
Après la première pause, l'ennui est si grand que je dois faire beaucoup d'effort pour rester concentrée, ne pas laisser mon cerveau s'endormir. Si au moins il y avait un peu de trafic, ça nous permettrait de bouger un peu, quelques voitures à doubler seraient bien venues pour rester en éveille.
Au lieu de ça c'est un « aigle » qui me sort de ma torpeur. Je le vois sur notre droite, voler en notre direction, il traversera l'autoroute sans doute. Mais c'est alors que je le vois descendre en piqué, toutes serres devant : il fond sur mon Mari comme la misère sur le monde ! Il faut croire que son casque blanc et noir le déguise en lapin aux yeux du rapace ? C'est à la dernière seconde que je le vois esquiver les pattes menaçantes du prédateur. Ainsi notre fille, sa passagère, aura été aux premières loges d'une étude de près de l'envergure de l'oiseau... Ouch' !
Jusqu'à présent on a de la chance car la météo annonçait orages et vents violents mais finalement seul le vent latéral vient compliquer notre progression. Rester assis dans la même position et avec la pression du vent est finalement, plus simple techniquement mais plus fatiguant que nos routes habituelles. Les pauses sont indispensables.
Quand la nuit tombe sur ma visière constellée d'éclat d'insecte et du gras de la pollution, je regrette de n'avoir pas prévu de quoi la nettoyer car ma visibilité en est vraiment gênée, ça augmente la fatigue. C'est avec soulagement que je vois la sortie de l'autoroute après 500 kilomètres sur ce ruban. Loin de moi l'idée de cracher dans la soupe c'est bien grâce à cette route que nous avons pu parcourir en une demi journée cette distance sans arriver au milieu de la nuit mais il faut reconnaître que ce n'est pas le plus amusant. Le soulagement est de courte durée car quand nous parcourons le dernier kilomètre, nous nous retrouvons sur une petite route étroite, abîmée et « réparée » à grandes pelletées de graviers. Nous finissons devant un portail fermé . Il faut que je m'arrête là, au milieu de ce chemin instable en attendant de trouver comment ouvrir le portail. Mes pieds glissent. Puis il faut redémarrer en braquant deux fois d'à filé, sur de la grave damée en contournant un trou : tout ce que j'adore ! Et dire que je vais devoir ressortir de là demain et toute la semaine. Allé, courage et concentration... au moins il n'y a pas de devers ! Et puis mon couvercle de conserve que j'ai dans ma poche va me servir pour une fois : c'est un excellent moyen de stabiliser ma béquille latérale dans ce parking!